En fonction du poids de la prise

vendredi 1 novembre 2013, à 23:59 par Berlol – Enregistrer & partager

Vendredi dernier (25 octobre), je suis allé à l’Espace Images de l’IFJT pour voir un film sur Fukushima réalisé par Kenichi Watanabe sur un texte commentaire de Michaël Ferrier. La salle était comble et ça le méritait vraiment, même si (ou parce que) tout ce qui concerne Fukushima fait froid dans le dos. À la suite de ce film, Michaël est venu sur scène avec la traductrice de son livre en japonais, Makiko Yoshie, pour lire des extraits choisis et répondre à quelques questions. Une soirée nécessaire qu’aucune captation pourtant ne vous restituera…


Le monde après Fukushima – Ryôichi Wagô par Telerama_BA

« Tepco, l’opérateur de la centrale, indemnise les pêcheurs de poissons radioactifs en fonction du poids de la prise. Les poissons sont rejetés à la mer. »


Le monde après Fukushima – les pêcheurs par Telerama_BA

Relation évidente avec un article lu par hasard dans la salle des profs du département de français de l’université Gakushuin une semaine avant, quand j’y suis allé pour une petite conférence de Roger-Daniel Bensky, professeur de Washington. Feuilletant les revues littéraires sur les présentoirs, je suis tombé sur le numéro 168 de Littérature, avec un article de Frédérik Detue intitulé « Noter le futur : témoignage et politique suivant Svetlana Alexievitch » dans lequel Detue analyse intelligemment le montage littéraire des témoignages de La supplication (2004 en français).
Montage de témoignages que restituait précisément la récente rediffusion du feuilleton de France Culture de 2006 – encore disponible et dont je recommande vivement l’écoute attentive.
Detue traite d’Alexievitch et de Tchernobyl. Il ne parle pas de Fukushima. Mais quand il parle de globocide, mot de Günther Anders, bien sûr cela concerne aussi Fukushima.

Enfin, avant de vous gratifier de ma dernière composition poétique et supraliminaire… je signale que le déplacement des barres de combustible radioactif de la piscine du réacteur 4 de Fukushima commencera le 8 novembre. Il ne s’agit rien moins que de l’opération la plus dangereuse pour l’humanité jamais mise en place. Si une seule barre tombe, c’est la catastrophe. Et cela va durer plusieurs semaines !
Ce jour-là, le 8 novembre, je ferai peut-être cours à l’IFJT le matin sur quelques chapitres de Candide, en présence de Stanislas Gros qui commentera un peu Voltaire et nous présentera son Dernier jour d’un condamné, d’après Victor Hugo. Puis l’après-midi autre cours peut-être, sur quelques pages des chapitres 4 et 5 de L’acacia de Claude Simon. Il y aura un marché aux livres dans le jardin de l’Institut. Peut-être.
Et tout ce qui pourrait être programmé par la suite le sera avec ce peut-être, cette épée de Damoclès, cette barre de Fukushima au-dessus de nos têtes et de nos vies, ou devrais-je dire nos demi-têtes et nos demi-vies.

Aux cœurs perdus de Fukushima

FOUtue fission
COUpable atome
CHImère énergie
MAssacre humain

Cœurs fondus, cœurs perdus, où êtes-vous ?
Dans quels tréfonds cachez-vous notre honte ?

FOUs de sciences imbus
COUs tendus vers toujours les gains
CHImie radieuse à l’envers escamoté
MAtamores d’isotopes en tête des médias

Cœurs fondus, cœurs perdus, où êtes-vous ?
Dans quels tréfonds cachez-vous notre honte ?

FUchsia mortes et décolorées
CUcurbitacées rabougries immangeables
CHIcorées géantes et carnivores
MAgnolias sans amour ni hirondelles

Cœurs fondus, cœurs perdus, où êtes-vous ?
Dans quels tréfonds cachez-vous notre honte ?

FOUdroyez les profiteurs du tout nucléaire
COUpez la dépendance aux centrales atomiques
CHIez sur les adeptes du tout nucléaire
MAssacrez le futur des centrales atomiques

Cœurs fondus, cœurs perdus, où êtes-vous ?
Dans quels tréfonds cachez-vous notre honte ?

© P. Rebollar, 2013.

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Publié dans le JLR

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