Mon quatrième auteur étudié vivant

samedi 12 décembre 2009, à 23:59 par Berlol – Enregistrer & partager

Dernier lever à six heures pour les beaux yeux de Flaubert… Est-ce à dire que je ne ferai plus de cours sur l’une ou l’autre de ses œuvres ? Peut-être pas. Mais rien n’est prévu en ce sens. Après tout, j’ai préparé des cours depuis des années sur des auteurs aussi divers que Zola, Colette, Mérimée, Sand, Duras, Simon, Sartre, Segalen, Balzac, Beckett, Renard, Camus, Toussaint, Gracq, Modiano, Rimbaud, Sagan & Réage, Le Clézio (à peu près dans l’ordre chronologique ; à vérifier dans les strates du JLR)… sans savoir si je les relirai un jour.
J’ai les notes et les enregistrements ; il faudra bien que j’en fasse quelque chose un jour. Quand je serai à la retraite, peut-être…
Actuellement, je me demande quelle sera la première œuvre du XXIe siècle que je mettrai au programme. En tout cas, la prochaine session, qui sera de cinq séances, sera consacrée à Alto solo, ce qui fera de Volodine, mon quatrième auteur étudié vivant, après Modiano, Le Clézio et Toussaint. Bien sûr, j’eusse aimé que tous me chicanassent pour des vétilles, en commentaire du blog ou par Facebook, à commencer par Flaubert, Beckett ou Segalen, mes préférés de cœur, mais en réalité même les vivants ne s’entremettent pas, sont très pudiques après avoir publié — la grande classe, pense-t-on. Peut-être faudrait-il que je choisisse un des auteurs que j’ai lus et qui se rendent accessibles (s’efforcent, daignent, font l’erreur de se rendre accessibles — barrer selon vous les mentions erronées), comme François Bon, Frédérique Clémençon, Laure Limongi, Philippe De Jonckheere, Éric Chevillard, Anna Rozen, Bernard Comment, Jean-Claude Bourdais, Emmanuel Tugny, Éric Sadin, Marc Pautrel, Oliver Rohe, Romain Slocombe, ou Ryoko Sekiguchi qui, oui, écrit en français…

Ce dernier cours est, comme prévu, un tourbillon. Je commence par l’aventure du mot rêve, avec quelques autres de son entourage sémantique (voir concordance ci-dessous). Un peu comme ce fut le cas avec le mot hasard, nous pouvons constater, grâce à la qualification en chiffre romain ajoutée par Bibi à chaque référence (quatre heures de boulot rien que pour ça), que la plupart de ces 67 occurrences relèvent de la fraude, d’un usage détourné, quoique fort commun, et qui a peu à voir avec l’activité onirique pendant le sommeil… Sans doute en irait-il de même dans la plupart des romans relevant peu ou prou du réalisme social. Et même dans l’uchronique et alambiqué Salammbô, comme on peut le vérifier en lui creusant l’index. La flaubertibilité de ce mot n’a rien d’onirique, donc, à une ou deux belles exceptions près. Elle réside en fait dans la tension proleptique (suspense) entre futur et illusion : ce dont Frédéric rêve deviendra-t-il réalité (futur) ou devra-t-il l’abandonner (illusion) ? Or, progressant dans le volume des pages, le lecteur finit par se résigner : pas de carrière de droit, ni dans les affaires, encore moins dans la politique. Deslauriers est (comme) un personnage de Balzac ; avec l’héritage que Frédéric a reçu, il eût sans doute réussi. Dussardier semble sortir d’un livre de Hugo ; sa droiture jusqu’à sa mort est une réussite en soi. Que reste-t-il ? Arnoux et les femmes.
Les femmes, c’est surtout ce dont je parle ce matin, et comment finir avec chacune des quatre qui ont de l’importance pour Frédéric : Marie Arnoux, l’idéale ; Rosanette, l’accessible ; Mme Dambreuse, le recours ; Louise, le pis-aller. Qu’on en juge à l’écoute. Et Arnoux, alors, à quoi sert-il ? On dirait bien qu’il est une sorte de double inversé de Frédéric : il est celui qui entreprend, qui tire des ficelles, qui régente son monde, et qui possède Mme Arnoux. Oui mais… mais… Ses entreprises périclitent l’une après l’autre, ses ficelles se rompent et ne se renouent pas (a-re-noue), son monde se dissout dès qu’il n’est plus solvable, et il ne sait pas aimer Marie, qui aime en secret Frédéric…
La morale de cette histoire, c’est qu’un homme bête peut en cacher un autre, le précéder dans la carrière. Que la bêtise est autant d’en faire trop que de n’en pas faire assez. Et qu’un ami avec qui rire des bonnes aventures, finalement (dernier chapitre), vaut mieux qu’un quarteron de femmes à aimer.

I. rêve : activité onirique durant le sommeil ;
II. rêve éveillé : attention relâchée provoquant vision ;
III. rêve imaginaire, fictif : pensée idéalisée, projection dans l’avenir.

2, 2| p.194_III parlait. Pendant une heure, il rêva tout haut à ces existences
1, 2| p.33_III de saint Louis ; ils en rêvaient dans le dortoir, d’où
1, 2| p.34_III troubles intérieurs ; alors, il rêvait des symphonies ; ou bien
1, 4| p.60_III abandonnait son oeuvre et en rêvait une autre qui devait être
1, 5| p.97_II brocart. D’autres fois, il la rêvait en pantalon de soie jaune,
1, 6| p.125_III au tapage des omnibus. Il rêvait à toutes les paroles qu’
1, 6| p.130_III de pareilles gens. ~ Elle rêvait de lui acheter le greffe
1, 6| p.130_I ses yeux, croyant qu’il rêvait encore, et, pour se raffermir
2, 2| p.187_II enfantines ; ou bien elle rêvait, assise par terre, devant
3, 1| p.387_III défendait le Pouvoir et rêvait la fusion des partis. Cependant,
3, 1| p.391_III joli bénéfice. Bref, il rêvait un grand coup de fortune
3, 2| p.417_III ne croyait ; le Vicomte rêvait le mariage. Il l’avait dit
3, 3| p.435_III impossible. Maintenant, il rêvait une grande chapellerie militaire.
3, 3| p.444_III prendrait un parti définitif. Il rêvait une autre vie, qui serait
3, 4| p.477_III découvrit la cause : elle rêvait mariage, — elle aussi !
3, 5| p.497_III là-dessous un mystère ; il y rêvait en considérant les billets.
1, 5| p.107_II lune. Il la contempla, en rêvant à la grandeur des espaces,
1, 6| p.128_II promenades. ~ Tandis qu’il rêvassait en marchant, elle cueillait
1, 1| p.20_III une femme ou quelque autre rêve. Le plaisir tout nouveau
1, 5| p.110_III Enfin, réalisant un vieux rêve, il s’était acheté une maison
2, 1| p.167_I (fin) y parvenir. Mais déjà le rêve l’avait pris ; il lui semblait
2, 2| p.197_III fortement vers son vieux rêve : un journal où il pourrait
2, 3| p.227_III Deslauriers touchait à son vieux rêve : une rédaction en chef,
2, 6| p.342_I disait-il,  » oui, demain ! je ne rêve pas.  » Et il sentait battre
3, 1| p.396_III emporter le monde dans un rêve des Hespérides, et que les
2, 3| p.245_I songe affreux : ~ —  » J’ai rêvé que vous étiez gravement
2, 3| p.245_I malades !  » ~ —  » Je n’ai rêvé que de vous  » , dit-il. ~
2, 6| p.332_III désespoir du beau qu’on a rêvé !  » ~ —  » Tous vos rêves,
2, 6| p.346_I pas venue. ~ Elle avait rêvé, la nuit précédente, qu’
3, 7| p.517_III les deux, celui qui avait rêvé l’amour, celui qui avait
3, 7| p.517_III l’amour, celui qui avait rêvé le pouvoir. Quelle en était
1, 5| p.79_III vie qu’ils avaient tant rêvée commença. ~ Elle fut charmante,
1, 5| p.80_III nègres ; — et ces choses rêvées devenaient à la fin tellement
2, 1| p.159_II sa tête brune, le faisait rêver à des caresses dévoratrices,
2, 4|p.273_II solennel, surtout, firent rêver Frédéric, qui bientôt n’
3, 1| p.401_II de leur chaos fait plutôt rêver à des volcans, à des déluges,
3, 3| p.442_II de ses sourires faisait rêver ; son charme enfin, comme
3, 4| p.456_II ses manières le faisait rêver à d’autres attitudes ; pendant
3, 4| p.488_I tout cela, croyait presque rêver. Son coeur se serrait d’
1, 6| p.127_II fois de hardiesse et de rêverie. Elle avait la taille de
3, 1| p.390_II/III disparaître ; dans la fureur de sa rêverie, le reste du monde
3, 3| p.440_III la Maréchale ?… Et sa rêverie devint tellement profonde,
3, 5| p.506_II tard, pourquoi pas ?  » ~ Sa rêverie, comme ses yeux, s’enfonçait
1, 2| p.34_III c’était le premier de ses rêves qui s’écroulait.
1, 5| p.86_III pas d’utopies, pas de rêves !  » En fait d’art (bien
1, 5| p.122_III (fin) fallu abandonner bien des rêves !  » ~ Il s’assit sur le
1, 6| p.132_III dans son coeur ses vieux rêves d’ambition. Elle s’y abandonna
2, 2| p.178_III livres de quoi justifier ses rêves. Il avait annoté le Contrat
2, 3| p.219_III autres. Par la force de ses rêves, il l’avait posée en dehors
2, 3| p.245_I/III un air calme. ~ —  » Les rêves ne se réalisent pas toujours.
2, 4| p.290_III retards qu’on opposait à ses rêves et désespérant de la patrie,
2, 6|p.332_III rêvé !  » ~ —  » Tous vos rêves, pourtant, n’étaient pas
3, 3|447_III ses appréhensions, ses rêves. ~ Elle recevait cela comme
3, 4| p.469_III une déception. Adieu ses rêves, et toute la grande vie
3, 4| p.484_III lui dit, en pleurant, les rêves qu’elle avait faits :
3, 5| p.505_III dans les décombres de ses rêves, malade, plein de douleur
1, 1| p.25_II comme si elle sortait d’un songe. ~ Le harpiste s’approcha
2, 3| p.245_I avait eu, l’autre nuit, un songe affreux : ~ —  » J’ai rêvé
3, 1| p.376_II eut l’air de sortir d’un songe, et, levant tranquillement
1, 5| p.87_I nuit, feignant d’avoir un cauchemar, il réveillait son compagnon
2, 6| p.349_I gagna ; et, à travers son cauchemar, il entendait la pluie tomber,
3, 1| p.414_III semblait vivre dans un cauchemar, une hallucination funèbre.
3, 5| p.506 (fin) mariés parurent. ~ Il se crut halluciné. Mais non ! C’était bien
1, 6| p.131_III (fin) Arnoux. Avec la netteté d’une hallucination, il s’aperçut auprès
2, 1| p.167_II/III (fin) vaisseau ; et, dans l’hallucination du premier sommeil,
3, 1| p.370_III tricolore ; et ce prurit, cette hallucination devint si forte, qu’il s’
3, 3| p.440_III profonde, qu’il eut une sorte d’hallucination. Il voyait là, sur le

Tags : , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

Publié dans le JLR

8 réponses à “Mon quatrième auteur étudié vivant”

  1. F dit :

    l’erreur, oui, probablement !

  2. Berlol dit :

    Ou restreindre les conditions à ceux qui ont un site auquel ils participent activement, un blog qu’ils écrivent personnellement… ce qui va grandement réduire la liste…

  3. PhA dit :

    « étudié vivant », ça fait un peu froid dans le dos…

  4. Berlol dit :

    Ne serait-ce pas le but, en vérité ?…

  5. PhA dit :

    J’avais bien remarqué que vous arboriez votre lampe frontale. Brrr… (Sans blague, en vous lisant je me suis rappelé un prochain rendez-vous chez le dentiste.)

  6. Berlol dit :

    Tiens ! Quelle coïncidence, j’y retourne moi aussi ce vendredi !…

  7. PhA dit :

    Allons, ces gens nous veulent du bien…

  8. Iec dit :

    Formidable, le podcast des aventures de Frédéric et de son quarteron. A renouveler, et faire circuler.